Saw 3D : le film de trop ?
La saga Saw fait un peu figure d'OVNI dans le paysage cinématographique horrifique. Non pas par sa longévité, la majorité des grandes figures de l'horreur ayant bénéficié de plus d'apparitions sur grand écran que le Tueur au Puzzle (7 + 1 remake pour Freddy, 8 films + un remake en 2 films pour Halloween, 10 films + 1 remake pour Jason Voorhees, etc.). Ni par la crudité de ses mises à mort, car entre les Cannibal Holocaust et autres, on a déjà donné. Non, ce qui fait la force de cette série, c'est justement le côté serialisé qui la caractérise, chaque film faisant référence à des éléments parfois laissés en suspens dans un épisode précédent, voire montrant sous un éclairage nouveau une scène déjà vue précédemment, comme une bonne série TV des familles. C'est d'ailleurs cet aspect qui m'a poussé à retourner année après année pendant 6 ans découvrir ma nouvelle dose de Saw au cinéma, et avec ce 7e opus, annoncé comme le dernier, mon impatience était à son comble ! Comment clôturer cette longue saga et nous offrir une dernière dose de sensation forte ? Qu'adviendra-t-il des personnages rescapés des épisodes précédents ? La fin sera-t-elle à la hauteur de nos espérances de fan ? Malheureusement, ça ne sera pas le cas...
En effet, après la perte de vitesse du 6e épisode en terme d'audience, les producteurs ont décidé de clôturer Saw à l'épisode 7 plutôt qu'au 8e comme prévu à l'origine. Une bonne idée, d'autant que le Saw VI marquait tout de même la conclusion du 2e arc scénaristique : après une première trilogie nous ayant introduit à l'univers et à la logique trouble de John Kramer aka Jigsaw, la seconde trilogie nous avait présentés celui qui semblait à première vue être son héritier spirituel (mais on découvrira dès le 2e volet que ce successeur n'avait pas exactement la même flamme que son mentor). Du coup, avec un 6e épisode nous présentant ce qui devait être le dernier "jeu" du sieur Kramer, on voyait mal après ça comment repartir sur une 3e arche narrative, surtout vu les situations où se retrouvaient les rares personnages récurrents n'ayant pas été trucidés dans les derniers épisodes. Malheureusement, la logique de l'argent étant ce qu'elle est, nos amis producteurs ont eu la bonne idée pour s'assurer des rentrées d'argent plus conséquentes de tourner ce 7e volet en 3D (car forcément, qui dit 3D dit places plus chères...), et c'est là que le bas blesse : cette technologie n'apporte strictement rien au film ! Certes, on a droit à des gros plans sur des armes s'approchant inexorablement de leur victime (et donc du public avec ses petites lunettes tendances), des petits bouts de chair qui nous giclent à la gueule quand y a un truc (comprenez une victime :p) qui pète, mais ça ressemble là plus aux artifices d'un nanard de bas étage qu'à autre chose, les précédents films parvenant à nous rendre mal à l'aise face aux pièges imaginés par Jigsaw sans avoir à nous placer du point de vue du futur tas de viande pour nous faire flipper...
Et toujours dans la logique purement commercial, on conclue certes l'histoire mise en place dans les films précédents, mais on s'en garde quand même un peu sous le coude pour faire une suite si, chemin faisant, on gagne un max de fric avec Saw 3D. Du coup, l'histoire alterne comme d'habitude entre un jeu qui est ce qu'il est, cad la dose de gore que recherche le public d'un film d'horreur (avec quand même une petite touche de moral derrière comme nous en avons l'habitude avec la saga, bien qu'ici les victimes sont tellement antiphatiques qu'on préfère quand même largement que le joueur les laisse mourir plutôt que de les sauver...), et une enquête en parallèle de la police pour tenter d'arrêter le Tueur au Puzzle, enquête constituant le véritable intérêt de l'ensemble pour les fans de la série. Et malheureusement, cette 2e partie est complètement gâchée par le fait qu'on doit tout boucler ici alors que la majorité des persos côté forces de l'ordre s'était fait dézinguer dans l'épisode précédent. Du coup, on nous sort du chapeau un inspecteur de l'IGS, censé super bien connaître le successeur de Kramer et donc le plus à même de mener à bien l'ultime chasse à l'homme, et qui au final ne sert absolument à rien. Et je ne parle même pas de son équipe, insignifiante, au point même que les scénaristes n'hésitent pas à les supprimer un à un dans une scène qui ressemble à un mauvais passage d'un bon vieux Halloween des familles... Quant aux personnages de Jill Tuck (ex-femme du Jigsaw originel) et du nouveau Tueur, ils perdent toute la saveur qu'ils avaient gagné tout au long de la 2e trilogie, devenant de pâles reflets de ce qu'ils étaient (et auraient dû resté). Las... Et je ne parle même pas de la quasi absence totale de Tobin Bell, LE Jigsaw Killer, qui nous gratifiait d'habitude de multiples scènes en flashback mais qui n'apparaît ici que le temps de quelques courts passages. Mais bon, on l'excusera par le fait que, son dernier jeu ayant été mis en scène dans l'épisode précédent, il n'était peut-être plus trop cohérent de continuer à le faire intervenir aussi souvent...
S'il y a une chose à sauver de ce film, ça serait sa dernière séquence, nous offrant comme à l'accoutumé dans la saga un joli twist (bien que prévisible à des kilomètres à la ronde) offrant un éclairage nouveau à plusieurs événements des épisodes précédents et jouant également le rôle de ressort potentiel pour une éventuelle suite (bien que la série mériterait de rester telle qu'elle, puisque cette fin à le mérite de boucler la boucle d'une bien belle manière). Mais c'est loin d'être suffisant pour effacer la déception que représente l'ensemble du film, et c'est pourquoi, à mon grand regret, je me dois d'infliger un petit 2 à ce Saw 3D...
Pour conclure, méditons ces paroles de John Kramer, qui résument finalement assez bien la morale mise en scène dans cette longue saga horrifique : "Most people are so ungrateful to be alive. But not you... Not anymore." (traduction pour les anglophobes : "La plupart des gens n'éprouvent aucune gratitude d'être en vie. Mais pas toi... Plus maintenant."
GAME OVER (?)